lundi 17 décembre 2012

241 Un fantasme à la recherche d'une identité propre 1


Existe-t-il des critères qui permettent une distinction objective entre l'univers de la fessée et le S /m ?

Un constat simple d'abord qui motive ce sujet: certains amateurs de plaisirs cuisants dont moi ne se retrouvent pas dans ce que l'on dénomme le sadomasochiste ou du moins dans l'idée qu'il se font de cette pratique. C'est avant tout une question de ressentir qui se base sur les associations strictement personnelles. Ce qui veut dire avec d'autres mots :

Chacun voit midi à sa porte !

Le don de soi, l'appartenance, la relation fusionnelle, la soumission, la domination, les liens, la maîtrise, le contrôle, l'attrait pour le pouvoir et ainsi de suite ne m'évoquent pas d'émotion frissonnante. Je ne vais pas me lancer à critiquer ce que je ne connais pas pour la simple raison que cela ne correspond pas à mes goûts. Argumenter selon mon propre ressentir me parait donc une entreprise périlleuse.

Ceci dit, personnellement je pense que des critères dépassant la pure subjectivité existent.

Je vais d'ailleurs citer deux argumentations qui me paraissent remarquables, car elles apportent à mon avis vraiment un surplus à la compréhension du sadomasochisme. Cela permettra à chacun et chacune de tirer ses propres conclusions en matière de fessée.

Mais d'abord un petit tour de ce qui me vient spontanément à l'idée sur le frontières entre ces deux domaines.

Quand je regarde des images qui montrent le résultat d’une fessée, il y en a qui m’attirent et d’autres non. Je n'aime pas les gros dégâts. Je conçois bien un beau rouge soutenu et quelques boursouflures avec une durée de vie qui ne dépasse à priori pas quelques heures. Car mes petits frissons se basent sur une identification avec ce que vois. Pour ce qui va plus loin, ce n'est pas pour moi et je zappe. Les marques ne symbolisent pas forcement pour moi un signe d'appartenance. Elles peuvent très bien aussi (dans un sens positif) être considérées comme un embellissement, en analogie d'un tatouage éphémère ou un body painting. Sorte de cadeau intime quel l'on affiche avec plaisir...et fierté !

La question de la douleur. Belle formulation qui vient d'un excellent clip chez Amandine et je ne saurais pas mieux résumer :

Une bonne fessée fait mal...jusqu'à un certain point !

Voila, il me semble donc important que mon partenaire ne ménage pas trop ma sensibilité fessière sans tomber dans la maltraitance. Notons aussi que je ne cherche qu’accessoirement et à des rares occasions dans cette pratique un effet douloureusement plaisant, sensé de me procurer des extases pas possibles. Je suis plus plus tentée par l'aspect punitif et douloureusement déplaisant qui apporte une satisfaction psychologique.

La durée de la fessée. Contrairement à la vanille pour moi la durée idéale d'une fessée punitive se situe vers 3 minutes et demi selon la version de la marche de Radetzki. Je suis peu attirée par une durée et ambiance Bolero, mais chacun son truc. Quand je regarde un clip le maximum que je tiens c'est... 30 secondes et encore.

Passons maintenant sur mon amateurisme en matière de réflexions. Dans la psychologie (domaine bien distinct de la psychiatrie et encore de la psychanalyse) il existe un comportement sexuel du type sadomasochiste :

On entend par là une recherche en matière de sensations qui va de plus en plus loin, qui a besoin de plus en plus d'intensité.

La raison est simple et très « Rolling Stones » : I can get no satisfaction...

Effectivement je pense que la satisfaction de manière générale ne dépend pas seulement d'une réussite dans la recherche du plaisir, d'un partenaire à la « hauteur «  des ses espérances fantasmatique, mais elle dépend également d'une satisfaction affective et émotive. Voila un lien vers un texte fort instructif qui traite entre autres cette thématique.

Ce que je retiens personnellement :

On peut très bien vivre son fantasme de fessée sans (trop) tomber dans le sadomasochisme dans le sens d'une escalade sensorielle.

8 commentaires:

  1. Tout à fait d'accord avec vous pour ce qui est de distinguer le S/M de notre fantasme de la fessée. Et comme d'habitude, je me suis bien amusé avec l'article que vous mettez en lien.
    Je note quand même qu'il y a un flottement de style un peu gênant dans cet article, entre des phrases qui se rapprochent du langage technique philosophique et des parties qui imitent l'oralité, le tout au détriment de la précision. Mais passons. Le S/M arrive seulement à la fin, et correspond d'autant moins à notre pratique qu'il est interprété comme un palliatif à un manque liée à une adolescence ratée. Je ne crois pas qu'on joue à la fessée "faute de mieux", c'est aussi un bon argument pour distinguer les deux.
    Mais - et là, je n'ai plus tellement de prétention à l'objectivité - à lire ce texte j'ai un peu l'impression d'être passé à côté de l'adolescence. Enfin, mon expérience n'est en rien généralisable, mais montre quand même que les cas cités par l'auteur n'ont pas non plus la valeur universelle.
    En fait, je n'ai jamais vécu mon adolescence comme un bouleversement. Je n'ai pas tellement la place de commenter tout l'article, mais l'émergence de la sexualité adulte n'a pas tellement changé mon rapport au monde, et je ne sais pas ce que c'est "se positionner face au sexe de l'autre". C'est peut-être qu'en dehors des situations précises, je continue à vivre dans un monde plutôt unisexe, et je ne fais rien pour le changer. J'ai aussi quelques doutes sur la signification de l'"occulte" - le dépassement du premier réalisme enfantin (supposition que les choses correspondent à l'expérience sensible que l'on en a immédiatement) s'est fait pour moi bien avant l'adolescence, et grâce à mes parents, que je n'ai pas eu du coup à déboulonner ni tester, il m'a suffi d'aller plus loin dans la direction qu'ils m'ont indiqué, et sans chercher des causes occultes. Je n'ai jamais eu l'impression qu'on voulait me cacher la réalité des choses. La seule partie de cet article dans laquelle je me reconnaisse, c'est celle qui consiste l'idéalisation et son rejet douloureux. Mais je n'ai pas regardé la vie privée des vedettes: puisque les individus, célèbres ou pas, sont toujours décevants parce que trop humains, j'ai préféré aller directement vers l'abstraction et l'absolu. L'attirance pour des jeux d'infantilisation s'expliquerait par l'absence de cette "crise d'adolescence"? En tout, cas, je me demande s'il n'y aurait pas un lien avec mon incompréhension pour les recherches et problèmes d'identité de tout poil dont on ne cesse de nous parler.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je n'ai pas lu les textes référencés, juste celui d'Isabelle et le com de Simon... Donc, sans comprendre, je peux dire, si ça peut aider, que j'ai fait ma crise d'adolescence, et bien, même!

      Par contre, je me retrouve assez bien dans la non envie d'escalade. Je ne recherche pas les limites de ce que je pourrais tolérer ou accepter. Elles ne m'intéressent pas, et je ne tiens pas à évoluer vers "plus de douleur" ou vers une éducation de "soumise" que je ne suis pas.
      A contrario, il arrive que ce soient des moments plus doux que ce à quoi je m'attendais qui me bouleversent complétement émotionnellement.

      Supprimer
    2. Merci Simon d'avoir pris le temps de lire mon lien. C'est un cours de psychologie universitaire qui s'adresse aux débuts je pense. D'où le style quelque peu étrange dans sa forme écrite.

      Je pense également comme en sciences naturelles en fait que chaque prof traduit en quelque sorte sa propre approche des formules ou ici des concepts psychanalytiques. Donner des mots à ce qui n'a pas de mot. Ayant pas mal d'habitude à ce genre de textes, celui-ci me paraît très bien fait pour plonger le nez dans le sujet et peut-être un des meilleurs que je connaisse pour introduire la terminologie freudienne.Et côté cœur, côté sagesse humaine c'est très proche des mots de mon Papa pour me préparer à ce monde. De son insistance que je prenne mon temps dans la sexualité. De me fier autant à mes sentiments qu'à mon corps. De m'écouter moi, de sonder mon désir.

      Ce qui me plaît dans ce texte c'est l'idée de l'escalade sensorielle comme caractéristique du S/m. Je pense que dans une fessée non S/m il y a la sensation d'avoir eu pour son compte. D'avoir acquitté ma faute sur un niveau personnel. D'un important apaisement affectif.

      J'ai lu vos confidence personnelles avec grand intérêt. Je me permet de donner une impression personnelle. En vous lisant un peu de partout, j'ai tout de même l'impression d'assister à une magnifique histoire d'amour avec Constance qui me rappelle...mon adolescence sur bien de points....

      Supprimer
    3. Merci pour votre commentaire Latis. Voila qui me change de lecture de forums. J'avais presque l'impression que la fessée soit toujours associées à un recherche purement sensorielle de plus en plus intense. La composante émotive que vous mentionnez me paraît très importante. Personnellement je trouve que c'est elle qui contient une des clefs vers mon attirance pour la fessée... comme une recherche de bouleversement...

      Supprimer
    4. Cela ne m'a pas coûté beaucoup de peine de lire l'article, j'aime beaucoup vos liens!
      Je pense surtout que le texte en ligne mélange la préparation écrite d'un papier universitaire et les notes de cours. C'est vrai que ça aide à l'initiation... Je n'ai pas vraiment suivi de cours sur la psychanalyse, mais une bonne présentation en cours de philo au lycée, plus quelques auteurs (en philo et en lettres) qui se référent à la psychanalyse permettent de se repérer. Ce qu'il dit "côté coeur" comme vous dites n'est pas faux - c'est vrai en revanche que je trouve ces remarques un peu déroutantes dans un papier universitaire, elles sonnent comme des digressions... Mais c'est aussi que je passe ma vie dans des articles scientifiques.
      L'explication du S/M par l'escalade sensorielle est très intéressante - dommage juste que ce ne soit pas un peu plus développé - et vous avez raison de rappeler cela pour distinguer le S/M de la fessée.
      Votre dernière remarque me fait penser à ce test que Dame avait mis à un moment sur son blog - apparemment, nos "âges sexuels" c'est 19 ans pour Constance et 17 pour moi... Et j'aime beaucoup ce côté adolescent - c'est dans la "crise" que je ne me retrouve pas...

      Supprimer
    5. Cher Simon,

      J'ai beaucoup de mal aussi avec le terme crise d'adolescence. J'étais une fille très attachée à ma famille et très intégrée dans les structures sociales. Ceci dit, je pense que ma crise s'est fait inconsciemment. Je ne crois pas qu'un fantasme de fessée soit de nature anodine. Il révèle toujours quelque chose. Ne serait-ce qu'une difficulté « d’adaptation sexuelle » dans mon cas, car le souhait de me trouver sous une tutelle ferme s'est manifesté dans maints fantasmes. Et je pense qu'à partir d'un certain âge j'aurais volontairement accepté des « châtiments corporels bienveillants ». Je suis là dans une expression en état d'élaboration, le sujet est en préparation, mais vu sa délicatesse ce ne serait pas avant...je ne sais pas combien de temps.

      Ceci dit, continuez à nous émerveiller avec vos récits et reportages d'une fraîcheur d'adolescence.

      Supprimer
  2. Merci pour ce texte en lien qui me permet de comprendre un peu mieux certaines réactions de mon fils qui entre dans l'adolescence...
    Par contre je n'y ai pas trouvé de réponse à cette question qui m'interpelle pourtant fortement: la fessée fait-elle partie du SM? Est-ce une pratique perverse? Je ne la ressens tellement pas comme telle... et je ne recherche pas non plus "l'escalade des sensations" dans cette pratique, mais bien un échange plus intime et plus profond avec l'autre. Alors, j'espère que ma vision a un sens, mais je ne pense pas trouver d'étude psychologique qui vienne l'étayer...

    RépondreSupprimer

  3. A mon avis il y a une réponse bien qu'indirecte. Un fantasme de fessée qui ne va pas en escalade se tient éloigné du mécanisme S/m. A croire le clip sur votre blog et selon mon opinion personnelle aussi la piste du fétichisme me paraît non négligeable dans le sens d'un déplacement de l’intérêt récréatif. Faut-il y voir une perversion. Ce concept a subi pas mal de variations au fil du temps. L’aliénation de l'esprit, la maladie de l'âme, la déviation de la normalité. N'oublions pas que l'exemple par excellence de la perversion était pendant longtemps l'homosexualité. Un concept qui s'est effondré entièrement et heureusement. Pour ma part qui vois midi à sa porte je ne vois pas la fessée comme une perversion quand il n'y a pas de dégâts physiques ou psychiques. Mais je vois un sujet difficile à aborder encore de nos jours.

    Je pense que votre vision et surtout votre travail a un sens car vous en faites un partage. Cela permet à beaucoup de personnes de se sentir moins seules avec leur fantasme. C'est en faisant un sujet public que s'effondre l'odeur de la perversité. Ceci dit moi aussi je suis bien d'accord avec vous sur le caractère d'un échange plus intime et plus profond avec l'autre... on y ajoutant quand fantasme y est.

    RépondreSupprimer