Oh
qu'il est nostalgique mon chéri !
Et selon mes (petites) expériences il
n'est pas le seul homme de sa génération avec un tel sentiment. Le
grand traumatisme d’avoir vu disparaître lingerie d’antan au
début des années 70 et ceci pour plus d'une décennie. Puis
réapparition toute discrète au milieu des années 80 dans … la
grande distribution. Je rigole toujours quand Monsieur se pique une
petite colère parce que son adolescence fut marquée par l'arrivé
du unisexe. Il trouve cela particulièrement « injuste ».
Et quand il en parle, il n'est pas loin de me faire une tête de
Caliméro. J'imagine sa déception. Étant petit garçon il a dû se
projeter d’innombrables fois à la place de son papa avec le droit
de regarder sous la jupe de femme. Et puis, devenu ado, quelle
horreur, plus de jolies attaches et la douce bande de chair entre le
haut de bas et la culotte, mais à la place un truc qui semble faire
office d'une ceinture de chasteté et qui s'appelle le collant. Heureusement mon chouchou a pu se
rattraper plus tard avec le retour en force de la belle lingerie.
Souvenirs qui se croisent. Moi jeune
ado bien plus tard, à la recherche de porte-jarretelles et de bas,
en ne trouvant qu’un choix de plus basique. Souvenir de mon premier
porte-jarretelles sous un jean. Petit secret partagé avec personne.
Les sensations si particulières que provoque je genre de vêtement.
Avec mes rêveries tournant autour de la découverte de mon audace
par un homme (ou de femme) qui m’applique une savoureuse fessée
pour avoir profané ma lingerie sous un jean. Au lieu d’avoir mis
une robe ou jupe.
Il est difficile d’imaginer le
contexte qui entourait ce genre de vêtements à la fin des années
80 en Allemagne. Cette touche d’interdit, non pas pour une
immoralité quelconque, mais pour traîtrise envers ce qu’on
croyait l’être du féminisme. Ado et encore loin d’être
moi-même, cela ne fut pas bien facile à vivre. Puis un fantasme de
fessée en plus qui ne me dérangeait pas vraiment, mais qui me
semblait impossible à réaliser car n'ayant plus cours du tout. A
cause d’un discours qui prônait une libre sexualité au naturel et
qui se passait de toute fantaisie. Alors je me suis rapidement
tournée vers les hommes plus âgées que moi. Ceux qui étaient
nostalgiques d'un autre âge. Un choix que je ne regrette pas. Et
cela me réussit. Il est agréable de vibrer avec son partenaire pour
des stimuli proches.
Initier un jeune de mon âge à cette époque ?
Et puis quoi encore ? Je suis de
la génération qui a grandi avec le prêt à l’emploi, prêt à
porter, prêt à consommer. Cela marque forcement. Héritage des Doors et de son génial
poète Jim Morrison : Nous voulons le monde et nous le voulons
maintenant. (We want the world and we want it now)
Mon fantasme de fessée est fortement
teint d’éléments fétichistes qui créent une ambiance
particulière. Il y a beaucoup de différent avec un fantasme qui
porte l’accent sur l’acte même. Ce qui explique bien pourquoi
certains fantasmes de jeux cuisants ne collent pas entre eux. Ce qui
montre aussi une autre difficulté : de trouver chaussure à son
pied. Disons que pour bien d’amateurs de la fessée fétichistes,
il suffit de formuler autrement. Par exemple...
...
trouver bas à sa jambe, jeans à son derrière, guêpière à sa
taille etc…
A mon avis le mieux que l’on connaît
les détails exacts de son fantasme, le plus propice se présente la
recherche d’un partenaire sur la même longueur d’onde. Il suffit
d’écouter attentivement et de poser les bonnes questions. Partager
un fantasme de fessée ne veut rien dire en soi. Cela ne va pas plus
loin à sa base que partager le goût pour certain aliment. Ce qui
importe c’est le plat que l’on en fait avec…
Le traumatisme de l'unisexe... évidemment, étant né un peu plus tard, je n'ai aucune raison d'être nostalgique. Mais chaque fois, je m'interroge, puisque je me suis toujours plutôt bien accommodé de l'indifférenciation, alors qu'au contraire, j'ai n'ai jamais été très à l'aise avec des marques de masculinité (j'ai du mal à dire "virilité" en parlant des collégiens...) affichées par mes camarades à l'époque, et qui ne me disaient rien.
RépondreSupprimerCe serait peut-être ça, la différence entre l'unisexe tel que tu le rejettes, et l'androgynie qui me plaît bien: le premier serait une privation de certains traits sexués, le second consisterait à avoir un pied de chaque côté.
Tiens, c'est un peu comme les gens qui parlent du déracinement - alors que moi, je suis très bien en étranger.
Moi aussi je me sens très bien en étranger. J'adore la France et je n'ai aucun sentiment de déracinement !
RépondreSupprimerIntéressante ta distinction entre unisexe et androgynie. Elle correspond assez bien aux idées que je me fais aussi à ce sujet. Mais je crois que pour l'unisexe cela va bien plus loin qu'une privation chez certaines personnes. Il me semble que ce traumatisme que j'ai observé touche des messieurs avec un penchant pour le fétichisme. Et c'est le manque du fétiche qui active leur nostalgie. Pour l'androgynie je crois que dans la philosophie grecque (au risque de me faire tirer les oreilles) elle correspondait à une tension entre les contraires, tandis que dans la religion chrétienne il y a possibilité que les contraires coïncident pour un retour à une harmonie du Paradis. Ceci dit je préfère ta formulation.
Mais non, je ne vais pas te tirer les oreilles... ça sortirait vraiment de mon rôle (habituel). En fait je ne partais pas vraiment de la philosophie grecque, mais simplement du fait que le brouillage entre féminin et masculin ne m'a pas jamais apparu comme traumatisant - du coup, je me disais que si cela traumatise certains, mais m’apparaissait plutôt attirant, c'est que ce n'est peut-être pas la même chose.
SupprimerJe ne me suis même pas demandé de ce que ça donnerait en rapport aux Grecs. Pour autant que je m'en souvienne, dans le mythe platonicien (mais c'est traître, comme toujours chez Platon: c'est le mythe raconté par Aristophane dans le Banquet et le passage le plus célèbre, mais c'est pas à ça que le texte aboutit) l'androgyne est une unité originelle, un être parfait d'avant une séparation des deux moitiés, féminine et masculine, qui depuis chercheraient à se réunir - c'est donc une tension à retrouver une unité perdue. Sauf que cela fait de l'amour une aspiration à la restauration d'un état antérieur, le mythe raconté par Socrate et attribué à Diotime (une femme donc!) en fait le fils de l'Expédient et de la Misère, toujours pauvre mais du coup, créateur, qui ne restitue rien du tout mais invente sans cesse.
Je verrais plus le récit biblique comme linéaire (du Paradis au Salut, plutôt que comme cyclique), mais je ne sais pas vraiment quel lien faire entre cela et la question de l'androgynie... mais il y a sans doute matière à creuser.
Merci pour cette explication Simon. Il me manquait des références pour mieux comprendre la position grecque. Alors là, ma soif de documentation est bien satisfaite.
SupprimerA vrai dire je ne suis pas posée beaucoup de questions sur l'androgynie dans ma vie. Mais disons qu'un rapport douloureux avec unisexe me semble un phénomène selon mes expériences concernant les gens d'un « certain âge ». Pour ma part c'est la privation de l'attirail « coquetterie féminine » qui a hanté mon enfance.