jeudi 4 juin 2015

716 Mémoires d'une éducation sévère 16


8.2 Discussion entre femmes


Lucie frémit. « Les oiseaux bleus », nom de la troupe, réunissait les filles qui recevaient les éducations les plus strictes au village. Adhérer à cette corporation impliquait à l’occasion de certains événements majeurs de la petite communauté d’afficher publiquement un état d’esprit orienté vers la discipline et l’obéissance. Lucie et ses amies ne rataient jamais les défilés de ces filles qui paradaient au pas cadencé pour le plus grand amusement des spectatrices, émerveillées par tant de coordination rythmique. Chaque mouvement fut exécuté avec exactitude irréprochable et laissa deviner un entraînement hors norme par le son de l’impacte parfaitement synchronisé des talons sur le parquet de la salle de fête.

Tu as besoin d’un encadrement strict pour t’épanouir ,

reprit Nadège.

Les instructrices connaissent leur métier. Elles peuvent, à tout moment, si elles le jugent opportun te sortir du rang et corriger ton attitude. Tu feras de progrès spectaculaires. Ainsi recevras-tu aussi une solide éducation anglaise hors maison.

Et si je refusais ?

Trop tard. Tu as voulu changer d’activité et j’ai cédé à ta requête. Je t’ai déjà mise sur la liste des candidates et acheté ton costume. Tu commenceras ta période d’essai la semaine prochaine. Nous avons donc assez de temps pour débuter ton entraînement. Je m’y connais bien. A ton âge j’étais chef de file des majorettes.

Je serais donc un « oiseau bleu » qui devrais s’exhiber dans une uniforme burlesque, le derrière presque à l’air dans le petit maillot string ?

Oui ma chérie. Tu découvriras le sens de la camaraderie et de la discipline en groupe. Et surtout le prestige de l’uniforme. Il me tarde te voir défiler. Sois à la hauteur de mes espérances si tu veux m’impressionner. Si tu arrives à intégrer la troupe, nous réviserons tes privilèges.

Que vont dire mes copines ? Je serais la risée de la bande, si cela se sait.

Lucie, il s’agit de ton avenir et pas le leurs. Tu as la chance de devenir un « oiseau bleu » et c’est tout ce qui devrait compter pour toi. Et si nous essayions ton uniforme ?

En fait, Lucie reçut deux uniformes, une pour les grandes parades et une pour entraînement. Ainsi comprit-elle aussitôt quel genre d’espoir Nadège cultivait à son égard.

La rentrée s’approchait doucement et il faillait à tout prix gagner le droit de sortie avant que ses copines ne revinssent. Par conséquence notre héroïne fut extrêmement motivée. La tenue de parade se composait d’une haute casquette qui portait l’insigne des « oiseaux bleus », surmontée d’une longue plume et qui se fixait par un ruban sous le menton. Le maillot, taillé dans une matière bleu foncée et brillante comme un miroir, se résumait à un juste au corps, épaules nues et montant vers le coup en encolure étroite. Il était très échancré dans l’entrejambe et de coupe string pour le derrière, en accentuant la taille par une large ceinture.
L’uniforme se compléta par de longues mitaines et des cuissardes à talons vertigineux.

La tenue d’exercice ne variait que pour le maillot qui ressembla à un petit haut s’arrêtant au dessus du nombril et laissant la partie entre cuissardes et maillot entièrement dépourvu de tout vêtement pour une « plus grande aisance du mouvement ».

Lucie n’avais jamais porté des chaussures aussi hautes et passa une bonne partie de l’après-midi pour acquérir une démarche acceptable. Elle n’était pas une fille maladroite, mais comprit vite que la grâce naturelle n’existait que dans le langage et se méritait par un travail acharné.

Désireuse de conquérir le droit de sortie, elle fit demande auprès de sa tutrice de porter sa tenue en permanence à la maison pour s’habituer au mieux à la façon de se déplacer avant de n’envisager les premiers mouvements complexes. Nadège approuva sa bonne volonté en optant pour la tenue d’exercice.

Pour mieux familiariser Lucie avec l’esprit régnant aux « oiseaux bleus », le martinet fut remplacé provisoirement par la cravache. Nadège changea également le programme de l’après-midi pour enseigner à son élève les mouvements élémentaires de l’art de la majorette, accompagnés par de la musique de marche.

Lucie apprit aussi à présenter son séant d’une façon convenable à la punition en penchant son buste en avant pour former un angle droit entre ses jambes et le haut de son corps, les mains autour des chevilles.
L’application rigoureuse de la cravache garda son attention au plus vif et elle fit de spectaculaires progrès. Toutefois la transpiration excessive de son entrejambe ne cessa point comme put s’apercevoir sa tutrice après chaque correction.

La nuit venu, pour évacuer la tension de la journée, Lucie dans son lit, s’abandonna à la seule possibilité qui lui restait pour calmer ses émois et y prit goût.

A suivre

20 commentaires:

  1. Bonjour Isabelle,

    Votre feuilleton me rappelle la série des romans écrits par l'écrivaine (quel mot) Colette au début du 20 è. siècle : "Claudine à l'école" qui est passé à la TV vers 1978- 1980. A ce propos, l'éducation donnée par les femmes est-elle de meilleure qualité que celle dispensée par les hommes ? Plus axée sur l'intellect et la réflexion que celle des hommes qui est peut-être plus pragmatique ?
    Je fait un peu de "Hors-sujet" mais , Isabelle, vous m'en excuserez comme à l'accoutumée.
    Mac-Miche.

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  2. Elle a été souvent très explicite Collette : « La perversion conduit nécessairement, inévitablement à l'infantile... » et dans ce sens je me sens flattée que mon petit texte vous évoques cette immense écrivaine, cher Monsieur Mac-Miche. Voyez, l'éducation dont je parle concerne un adulte qui arrive par les méandres de ses irrationalités à un stade qui semble évoquer l'infantile et qui cherche un coup de main pour mettre de l'ordre dans son chaos intérieur. Difficile de faire le parallèle avec l'éducation d'un enfant. Quant à vos questions je ne saurais trancher, je ne saurais même pas donner une définition d'une éducation de qualité...

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    1. chers Isabelle et monsieur mac - miche

      En effet Colette était une femme intélligente pleine de finesse et de subtilité dans ses propos et ses analyses ; j' ai pris grand plaisir à la lire ; j'ai pratiquement toutes ses oeuvres .
      Un sacré tempérament ! cette Colette
      Amitié à vous deux
      Jacqueline






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  3. Missy, toujours en pantalon et cigare au bec, la cravachait d'importance.
    Les leçons firent leur effet puisqu'elle infligea à son tour le traitement à sa secrétaire.
    On a quelques bonnes raisons de penser que les fesses de la belle Polaire furent zébrées également. Par ses soins bien évidemment.
    On vivait à virevolte de cuir, à cette époque !
    Sans se poser de question !...

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  4. A mon avis pour écrire des réflexions aussi profonds il faillait un peu plus qu'un simple vécu. Moi j'aime bien me poser des questions...

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  5. Mais bien sûr, qu'il faut un peu plus qu'un vécu !
    Et même beaucoup plus...
    Je vous rapportais simplement, ma chère Isabelle, des éléments connus de son comportement.
    Le reste... est tout le reste !

    Il est d'autre part intéressant de constater combien le sexe était vécu beaucoup plus librement... il y a longtemps...
    Le XIXème siècle l'a massacré, au sens littéral du terme.
    Seuls les artistes et autres marginaux ont échappé à cette folie.
    Dont l'apothéose est l'après-guerre... et le triomphe de la masturbation intellectuelle.
    Les survivants de mai 68 sont intimement convaincus d'avoir fait leur fameuse révolution...
    On est toujours loin ne serait-ce que du Moyen-Âge !!!

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  6. Je suis très peu calée en littérature, cher Monsieur Why Not. Manque de temps. Alors Colette je la connais seulement de quelques citations... remarquables. Je vous vois donc en bon connaisseur en la matière.

    J'ai parfois l'impression que la liberté sexuelle traverse l'histoire humaine par phases. Il existe par exemple un très riche matériel sur la fessée, datant de la fin de des années 20 du siècle dernier qui parle déjà de la mode de la fessée dans les couples.

    Enfin, née au début des années 70 la libération sexuelle était déjà un acquis social quand je me suis lancée dans la recherche de princes charmants. J'ai donc beaucoup de mal à imaginer les périodes moins libres....

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  7. Je suis loin d'être un spécialiste, chère Isabelle... peut-être même tout le contraire...
    Il se trouve que le hasard, à moins que ce soit le monde que j'ai côtoyé dans mon métier, m'ont fait rencontrer un grand nombre de gens avides de fesser leurs congénères ou de hurler sous le fouet...
    Il se trouve aussi que ce genre de mœurs est monnaie courante chez les gens célèbres de l'art et de la littérature...
    Il ne m'a fallu que satisfaire ma curiosité.

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  8. Sans parler de gens célèbres (je n'en connais pas!), cher Monsieur Why Not, il semble suffire parfois selon mes expériences d'une âme littéraire ou penchée vers les art pour découvrir de jolie tendances vers notre sujet.
    Un terrain également fort propice se trouve chez certains scientifiques toutes disciplines confondues. Mais bon, j'aime surtout découvrir ce fantasme chez Monsieur et Madame tout le monde, loin de tout rapport avec le BDSM ou du milieu « spanking » et qui eux aussi ont de petites fantaisies et les réalisent « fait maison ».

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  9. Bonjour, ma chère Isabelle.
    Je parle des gens célèbres dont on connaît les biographies...
    Ne serait-ce que Chopin et Georges Sand... sans oublier Musset.
    Et l'affreux Zola.
    Et toute la bande de la Belle Epoque...

    C'est vrai que, question fessée, j'ai eu la chance de rencontrer grand nombre d'intéressés... qui étaient des Monsieur Tout le Monde...
    Quant au milieu spanking, comme vous l'appelez, le peu que j'ai pu en connaître est pour le moins fort peu engageant...
    Il semble que leur ciment soit avant tout une prétention himalayenne...

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    1. J'ai eu, il y a bien longtemps quelques - je l'admets volontairement - agréables contacts avec des personnes du milieu « spanking ». C'était fort intéressant notamment pour les discussions - bien que virtuelles- entre filles où j'ai pu apprendre bien de choses sur bien de messieurs. Disons que je conseillerais à chaque dame, souhaitant de faire des rencontres sur le net, de se chercher d'abord des copines déjà sur place....

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    2. Je ne puis que répéter : comme vous avez raison !

      Il y a de ces numéros, sur le net...

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    3. A vrai dire, cher Monsieur Why Not, je suis assez effarée de l'insouciance de certaines dames dans leurs rencontres. Elles doivent avoir les fesses dures dans le sens littéral de l'expression...

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  10. Bonjour Mr WHY-NOT,

    Evidement une "belle équipe" que tous ces gens-là.
    Personnellement, je n'aime pas trop les clubs et autres cercles privés , ça fait toujours un peu trop élitiste. Mais les gens sont peut-être triés sur le volet pour la plus grande tranquillité de ces membres. Mais c'est un choix et je le respecte.
    Tous les goûts sont dans la nature, dit-on . Je suis toujours adepte de la simplicité: aller à l'essentiel avec un minimum de préparation. Profiter au maximum du moment sans se perdre dans trop de détails...
    Mac-Miche

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  11. Elite... oui, mais de quoi ?!...

    Cher Monsieur Mac Miche, quel bonheur que la simplicité ! Comme vous avez raison !
    Carpe diem.
    Vale.

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  12. Carpe diem, carpe diem... j'ai une fille de six ans moi, alors je dois me poser tout de même des questions sur ...quam minimum credula postero, ce fameux lendemain... Bref, métaphysique féminine... qui peut gâcher les plus beaux moments ! Enfin, j sais très bien ce que peut signifier un carpe diem d'un monsieur envers une dame... rire ! Leçon de philo de mon papa !

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  13. Bonjour Isabelle et Mr Why-not,

    Je n'ai qu'un mot à dire : "Ite Missa est ". Je me retire sur la pointe des pieds. Je ne voudrais nullement déranger ce conciliabule. Rires.
    Ca me rappelle une citation de Platon ou Socrate, sujet d'une dissertation en classe de Terminale G1 : "Techné mimetaï ten physis" : en gros :
    " l'Art imite la Nature". Enfin quelque chose dans cet esprit là. On nage en pleine Philosophie. Bonne leçon.
    Mac-Miche.

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  14. Soyons clairs, cher Monsieur Mac-Miche, la philo pour la philo reste stérile, par contre elle est hautement utile quand on transpose ses conseils dans la vie courante...

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  15. Bonjour Isabelle,

    Je suis bien d'accord avec vous. En elle même, la philo reste une discussion littéraire et tente d'apporter un certain éclairage sur des grands principes de l'existence. Son rapport avec la vie quotidienne me semble moins évident.
    Du moins à mon avis personnel. Rires.
    Mac-Miche.

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