jeudi 29 janvier 2015

646 Mémoires d'une éducation sévère 1.1

(Voici le premier épisode d'un très long feuilleton, purement fictif qui date de pas mal d'années et que j'aimerais rééditer dans un rythme hebdomadaire.)


1 Un choix inattendu

Il parait que tu changes de tutrice ? 

Lucie fit un bond, puis rougit. Camille n’avait jamais observé auparavant une telle réaction chez son amie.

Bien obligée. La mienne doit quitter le village pour des affaires familiales. Alors je suis orpheline en quelque sorte.

Et as-tu déjà fait ton choix ?

Camille s’efforce de cacher son impatience. Ses sentiments envers Lucie sont troubles depuis quelque temps. Il lui arrive d’imaginer un tas choses dont elle n’est pas fière. L’occasion est trop belle. Elle espère secrètement que le choix de son amie se porte sur son foyer. Qu'elle opte pour Marie-Ange, sa propre tutrice. Ce serait trop chou de partager le quotidien avec Lucie, de l’avoir en permanence à proximité. Hélas, la douche est froide :

Je m’installerai chez Nadège. Je dois me présenter cet après-midi avec mes bagages. 

Camille crut à une plaisanterie de mauvais goût. Lucie aimait provoquer et déconner. C'était sa deuxième nature.

Celle-là est bien bonne. Cela ne marche pas avec moi. Arrête tes bêtises… 

Je suis parfaitement sérieuse !

Camille marque un temps d’hésitation. Elle sait que Lucie est difficilement cernable. Cela fait partie de son charme et la rend encore plus attachante aux yeux de Camille. Lucie est aussi une grande gueule. Rien ne lui fait peur, rien ne l’impressionne. Elle est toujours partante pour un défi. Camille est déçu. Puis elle vient de réaliser la porté de ce choix inattendu.

Nadège ? L’anglaise tu veux dire ? Es-tu tombée sur ta tête ?

Elle frissonna. Rien que le nom de cette femme la remplissait d’appréhension. La réputation de Nadège n’était plus à faire au village. Comme son surnom indiquait, ses méthodes fournissaient de quoi à papoter dans les chaumières. Autant plus que Nadège restait toujours très discrète sur ses astuces éducatives. Elle avait incontestablement la main heureuse pour former des élèves modèles. Une femme qui aimait cacher son jeu. Sur ce point elle ressemblait beaucoup à Lucie. D’ailleurs comme tout le monde Camille aurait donnée bien cher pour savoir ce qui se passait derrière les portes de la maison de cette exigeante dame dont la sévérité exemplaire ne faisait aucun doute. On ne connaissait que quelques éléments de son vaste programme, les plus visibles. Ses élèves se faisaient régulièrement remarquer après les cours de gym, sous la douche. Au grand bonheur du jeune public féminin en quête de distractions.

La signature de Nadège était inimitable. Un fessier passé entre ses mains ne ressemblait à aucun autre. Vivre chez elle impliquait un début de semaine avec de remarquables stries qui laissaient supposer un week-end consacré à l’ intensive étude de bonnes manières.

Il n’existait aucun acquis chez elle. Le moindre privilège se méritait durement. Les tenues de rigueur qu’elle imposait à ses élèves étaient éloquentes. Voire ridicules selon les mauvaises langues. Vivre chez elle impliquait un rude combat pour obtenir l’autorisation de se promener en jeans moulant comme les copines. A moins d’en cacher un chez une amie de confiance pour ne pas se faire remarquer à ses rares permissions de sortie. Vivre chez Nadège, c’était considéré comme se compliquer inutilement la vie. Courir le risque de se choper une déculottée devant témoins quand on s'exposait publiquement à son désapprobation. Avec elle il valait mieux se tenir sagement.

Et pourtant, à la connaissance de Camille, aucune de ses anciennes élèves ne s’était jamais plainte. Quelques mois suffirent pour installer une telle complicité entre cette femme et sa protégé que cette dernière devint sa plus fervente admiratrice. Prête à défendre Nadège devant n’importe qui, dans n’importe qu’elle condition.

As-tu bien réfléchi Lucie ?

Lucie ferma ses jeux pour s'évoquer une millième fois un étrange incident dont elle eut été témoin l’année dernière. Elle n’avait jamais osé en parler à personne, même pas à Camille. Bien qu’elle ne fût que spectatrice, elle ressentait toujours un trouble profond qui ne l’avait plus quittée depuis ce jour-là. Le souvenir la dérangeait, la hantait. Elle eut à mainte reprise essayé de faire comme si cet événement ne s’était jamais produit. Mais ses efforts restèrent vains. Quelque chose avait changé en elle, vivait en elle et lui dictait une loi incontrôlable qui ne venait pas de la raison, mais de la profondeur de sa nature. Souvent Lucie avait impression qu’elle eût perdu l’emprise sur sa vie à cet instant précis et maudissait le hasard qui l’avait amenée sur un chemin qui l’effrayait. Comme si son insouciance s’était évaporée pour laisser place à un désir qu’elle n’arrivait pas encore à décrire, mais qui s’imposait avait une force dont Lucie se sentait impuissante d’y résister.

Coucou, tu es avec moi, Lucie ? 

Tout compte fait, j’ai trop envie de me mesurer à Nadège. Ce n’est pas un être surhumain, mais une femmes comme une autre. Elle ne me fait pas peur. On verra bien qui est la plus forte. Je suis décidée de lui mener la vie dure. Elle a besoin d’une bonne leçon et ce sera moi qui va lui la donner.

L'intonation de la voix de Lucie souligna sa détermination. Un accès d’admiration pour son amie traversa l’esprit de Camille. Pour un instant elle crut tout possible, tellement la volonté de son amie l’impressionna. Ensuit un instant de silence. Lucie s’était égarée à nouveau dans ses souvenirs.

A suivre...

7 commentaires:

  1. Bravo !
    Saluons l'arrivée du nouveau-né, à qui nous souhaitons longue vie.

    Mille félicitations

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  2. Bonjour Isabelle,


    Voilà une nouvelle histoire qui démarre sur les chapeaux de rues.
    Hum... C'est David contre Goliath. Ca promet un beau match. Un pugilat 100% féminin et ces demoiselles ne font pas dans la dentelle. Mais , chuuut...
    Attendons la suite. Mac-Miche

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    1. Effectivement c'est un univers exclusivement féminin, inspiré par le superbe travail de Jean-Philippe , alias Escobar. Qui a également participé à la création de cette histoire par ses suggestions et remarques.

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    2. Bonjour Isabelle,

      En effet, Mr JPC nous régale avec tout ce monde fessophile dans lequel l'homme reste spectateur de ce troublant gynécée...
      Un grand artiste et amateur de femmes et des fessées, j'imagine.
      Ah les Femmes, éternelles sources d'inspiration pour les artistes de tous ordres. Et encore merci. Mac-Miche

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  3. A priori il y a pour... un an, cher Monsieur Why not! Rire! A moins que je trouve de plus l'inspiration pour écrire quelques nouveaux chapitres que l'on me demande depuis si longtemps. Notons que j'étudie toute suggestion qui correspond à cet univers bien particulier du bon (grand) enfant...

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  4. Continuez à l'écrire, s'il vous plaît. Peut-être cela sera la plus belle histoire dans ce blog. Au moins, le commencement a me plu beaucoup.

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    1. Je vous souhaite la bienvenue sur mon blog, cher Monsieur Chat vert. Ravie que mon histoire vous plaise. Ne vous inquiétez pas, à moins d'un cas de force majeure, il y a aura une suite chaque semaine...

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