8.1 Discussion entre femmes
Non
Lucie, il est hors de question que je revienne sur ma décision. Le
rendez-vous chez Bérénice est pris et tu t’y présenteras dans
deux semaines comme convenu. Ne t’inquiète pas, je serai avec toi.
Lucie avait demandé un entretien entre
femmes, expression que Nadège affectionnait tant. Ces conversations
se passaient toujours autours d’une « bonne tisane ».
Son aversion contre cette boisson, infâme à son goût, n’avait
pas changée. Un jour elle osa en parler à sa tutrice qui l’écouta
attentivement. Nadège ne prit jamais une critique à la légère et
ne refusa jamais de faire tour d’une de ses règles de bonne
conduite. Elle partait du principe que rien ne s’imposait sans
raison et l’élève avait le droit « d’exiger » une
explication. Cette transparence lui valut l’estime de sa protégée
qui, malgré l’intransigeance sur les décisions prises, vit une
porte à saisir pour améliorer ses conditions d’éducation.
Ce jeu de force la stimulait fortement.
Elle aimait trop les défis et la difficulté ayant compris que la
vie appartenait au plus habile. Chaque entretien avec Nadège lui
parut comme un excellent moyen d’exercer sa technique
d’argumentation et elle n’hésita rarement de saisir son droit ;
au point que ces têtes à tête devenaient une habitude quasi
quotidienne après le goûter. Ce moment de liberté renforça
significativement le lien entre tutrice et élève.
Il en va de soi que Lucie sortait
toujours perdante pendant des semaines. Elle n’en voulait rarement
à Nadège et passa des longues heures à cogiter sur des meilleurs
raisonnements pour la prochaine fois. En plus, Nadège ne considérait
jamais un sujet comme clos. Lucie avait le droit aussi de revenir à
tout moment sur n’importe qu’elle discussion en apportant de
nouveaux éléments. Par contre elle n’admit pas une reprise sans
fondement, motivée uniquement par une prise de tête. Dans ce cas
elle rappela Lucie les conséquences d’un comportement de gamine en
la traitant ainsi. Elle ne s’adressait plus à la raison de son
élève, mais à sa peau des fesses, plus susceptibles de comprendre
les règles du jeu.
Quant à la tisane elle écouta Lucie
longuement avant de trancher :
Il
en ressort que de ton aversion se base sur rien d’autre qu’une
simple histoire de goût personnel. Pour te rassure, je n’aime pas
la tisane non plus, mais j’en bois parce que je suis convaincu du
bien fait.
Lucie fut stupéfaite. Il s’agissait
de la première confidence intime -d’une très longue série - de
la part de sa tutrice et il n’est pas exagéré de prétendre que
Nadège gagna ainsi la confiance de sa protégée. Lucie savoura en
quelque sorte sa première victoire et se sentit encouragée dans ses
efforts. Cependant le contrecoup de sa découverte fut cher payé.
Elle dut étudier un épais manuel sur l’art et l’utilisation de
la tisane et se vit contrainte de contrôles écrits sur son savoir
fraîchement acquis. Il est évident qu’en dépit de bon résultat,
elle affronta le martinet jusqu’à ce qu’elle afficha de solides
connaissances sans lacunes.
En cet après-midi pluvieux, Lucie
exposa son point de vue sur l’épilation qui la menaçait. Et elle
se prit mal. Elle évita bien sur l’origine de ses rougeurs, mais
se basait en toute honnêteté sur ses craintes concernant la rentrée
et la douche commune avec ses copines après la gym.
Une
forte pilosité ne fait pas de toi une femme responsable ou plus
mature qu’une autre. Tu n’as pas besoin de tes poils pour
afficher ta féminité non plus. Je ne t’impose pas une telle
mesure pour te ridiculiser devant tes amies, mais pour améliorer ta
santé. Tu seras intégralement épilée que cela te plaise ou pas.
C’est ton bien-être qui te fera comprendre le sens de cette
mesure. Puis n’essaye pas de me faire croire que l’envie de
dénoter ne fait pas partie de ta personnalité. Il serait temps que
tu commences à t’assumer avec tes points forts et faibles.
Lucie se sentit vaincue et essaya de
gagner un peu de liberté sur un autre terrain.
Dans
un autre ordre d’idée,
commença-t-elle timidement,
je
ne vois plus l’utilité de mes cours de gym. Nous en faisons assez
tous les matins. Il serait plus judicieux que je choisisse un autre
sport qui m’apportera des atouts complémentaires.
Tu
as mûrement réfléchi ?
Il
me semble…
Dans
ce cas je ne vois pas d’objection. J’allais t’en parler de
toute façon un de ces jours. Je verrais d’un très bon œil que tu
t’inscrives à la fanfare comme majorette.
A suivre
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